Une histoire de famille.
Jayos,
Je connais ton nom, tu connais le mien, nous avons été élevés ensemble. Par contre, je ne me souviens plus du tout de celui de ton collègue qui passa avec toi la porte de la chambre de la maternité le lendemain de la naissance de ta nièce.
Tu me l’as présenté et sa radio a crépité. Il est sorti répondre à l’appel dans le couloir puis est revenu quelques instants plus tard. Il te regarda et te fit signe qu’il n’y avait « rien d’important ». Entra alors une aide-soignante pour une raison que j’ai oubliée et qui, avant de sortir lança un « Tout va bien Madame ? » « Oui, merci. »
Votre visite fut ponctuée ainsi par les allers-retours de ton collègue répondant à la radio dans le couloir et de ceux du personnel hospitalier me posant toujours la même question : « Vous avez besoin de quelque chose? » « Si vous avez besoin appelez-nous. » etc…
Au bout de quinze ou vingt minutes, de retour dans la chambre, ton collègue t’a dit « là faut y aller ». Vous n’étiez pas sitôt partis que le médecin et l’infirmière de garde entraient. « Tout va bien ? » me demanda le doc, « Oui » répondis-je ne comprenant pas vraiment pourquoi il étaient là. Ils se sont regardés l’air embêtés « Vous êtes sûre ? Parce que votre dernière visite… »
Et là j’ai compris. « Oui ! Mais non ! L’un d’eux est mon frère, il est venu voir sa nièce !!! » Soupir des deux. « Excusez nous mais on a cru que… »
Il est vrai que deux policiers en uniforme dans une maternité, ça ne devait pas être très courant. L'un qui rend compte à la radio, l'autre qui reste dans la chambre. Ils avaient cru... Ils avaient cru plein de choses.
Voilà comment, pendant un gros quart d’heure, grâce à toi, je suis passée pour une personne peu fréquentable et recherchée aux yeux de tout le service de maternité.
Bien à toi, mon frère, merci pour ce grand moment de solitude.